Couture Porte-Bonheur : une entreprise humaine

Accélérateur

Je vous présente aujourd’hui le parcours inspirant de Natalia Mejia, cofondatrice et présidente de Couture Porte-Bonheur. Natalia termine tout juste la première phase du parcours IMPULSION5 avec Espace-inc, un parcours qui a duré toute une année, un parcours qu’elle termine la tête haute, car elle a relevé le défi avec brio!

 

Couture Porte-Bonheur est une entreprise spécialisée dans la manufacture textile qui aide les designers et créateurs québécois à réaliser leurs projets de couture. L’entreprise fait tout, de la conception à la confection et à l’emballage de produits textiles. Elle a même un service clé en main de vente d’équipements de couture. Pourquoi offre-t-elle tous ces services? C’est simple, la joie du métier de Natalia est de découvrir des projets, partager des expériences et côtoyer des créateurs et entrepreneurs qui, comme elle, rêvent de faire grandir leur entreprise au Canada.

 

Cette valeur profonde de partage, si importante pour Natalia, ne date pas d’hier. Ce sont d’ailleurs les valeurs de l’entrepreneure et la façon dont elles sont transposées dans son entreprise au quotidien qui m’ont inspiré à écrire cet article. Suivez-moi le long de ces lignes et vous comprendrez rapidement pourquoi.

 

Tous les chemins mènent à… la couture

Pour Natalia, la couture n’était pas un premier choix de carrière. Originaire d’un quartier défavorisé de Medellín en Colombie, elle a grandi à une époque où il était dangereux de simplement se promener dans les rues. Sa mère travaillait donc à la maison où elle avait commencé à coudre à la naissance de ses enfants en leur confectionnant des vêtements. L’activité qu’elle faisait par nécessité s’est rapidement transformée en métier.  Lorsque Natalia a atteint l’âge de 10 ans, sa mère lui a appris à coudre. Tous les jours, au retour de l’école, elle aidait sa mère dans ses projets. En grandissant, il lui est devenu apparent que ce n’était pas un futur dans lequel elle se projetait :

 

 « Je trouvais ça très lourd.  J’étais tellement reconnaissante à ma mère de m’avoir appris la couture et un métier pour gagner notre vie. Je la voyais devant sa machine à coudre tous les jours pendant 18 h. Moi, je m’étais promis que je n’allais pas exercer ce métier, c’était beaucoup d’heures. Pourtant, aujourd’hui, Estevan et moi, nous aimons beaucoup notre métier. »

 

C’est parce qu’elle ne voulait pas de cette vie qu’elle a décidé d’aller à l’université en administration d’entreprise. Toutefois, le destin avait un autre chemin dessiné pour cette jeune entrepreneure en devenir.

 

Alors qu’elle était à l’université, elle a rencontré Estevan, un canadien d’origine colombienne né au Canada, en visite dans son pays d’origine. Amoureux, Estevan a décidé de s’installer en Colombie pour être près de Natalia. Il a donc, à son tour, été initié à la couture par la mère de sa bien-aimée. Ensemble, ils ont créé le premier atelier de confection alors que Natalia était encore aux études.

 

Le couple a vécu ensemble en Colombie pendant 5 ans, ils se sont mariés et puis, Natalia a eu son premier enfant. Elle a alors décidé de quitter les études pour rejoindre son mari et sa mère à l’atelier de couture. L’entreprise évoluait bien, mais avec une trentaine d’employés dans une économie marché instable, le niveau de stress était élevé. Ensemble, ils ont décidé de venir s’établir au Canada.

 

Une résilience à toute épreuve

À son arrivée, Natalia peinait à trouver du travail. Elle ne parlait pas un mot de français, ce qui est difficile à croire lorsqu’on l’entend aujourd’hui parler avec enthousiasme de son entreprise. Elle s’est donc remise à la couture. Cela lui a permis de gagner sa vie tout en étant présente à la maison pour élever ses enfants, une priorité pour elle.

 

Encore une fois, l’entreprise a graduellement pris de l’ampleur. Le sous-sol de la maison s’est transformé en atelier de couture. Au début, les membres de la famille d’Estevan et la mère de Natalia formaient la principale main-d’œuvre et au fil du temps des employés se sont greffés au noyau familial. Le sous-sol, bourdonnant au rythme des machines à coudre, est rapidement devenu trop petit. Ils ont donc dû faire la transition vers un espace plus grand, maintes et maintes fois. Aujourd’hui localisée à Longueuil, l’entreprise est en plein essor.

 

Les enjeux de l’industrie du textile au Québec

Le principal défi pour les entreprises dans le domaine du textile au Québec est le manque de main-d’œuvre. Les entreprises trouvent difficilement les ressources qualifiées dont elles ont besoin comme les couturier/ères qui se font rares de nos jours. Pour cette raison et par manque d’expertise, la plupart des ateliers de couture se spécialisent dans un seul segment. Ce n’est pas le cas pour Couture Porte-Bonheur. L’entreprise se différencie de par sa capacité à travailler avec tous les types de textile, même des matières recyclées. Elle peut tout faire, du maillot de bain au sac à dos en passant par le porte-bébé. Ainsi, Natalia et Estevan avec l’atelier Couture Porte-Bonheur permettent à des entreprises locales de concevoir tous leurs produits textiles au même endroit alors qu’ils doivent généralement faire affaires avec plusieurs ateliers de couture pour leurs différents projets. De cette façon, ils ont réussi à bâtir une base de clients récurrents et exclusifs. Et, la beauté de la chose, c’est que tout est fait localement et humainement. C’est très tendance, mais peu d’entreprises peuvent l’offrir.

 

« Maintenant, nous avons une équipe de collaborateurs, couturiers et couturières, de personnes qui font la découpe, le contrôle de qualité, une équipe de marketing, une comptable alors on travaille tous ensemble. Ils peuvent s’adapter facilement aux besoins des clients. » – Natalia Mejia

 

Contribuer à quelque chose de plus grand que soi !

Alors que l’industrie du textile manque de main-d’œuvre, Natalia, elle, n’a pas de difficulté à embaucher du personnel. Comment s’y prend-elle? Elle embauche des nouveaux arrivants, des immigrants qui, comme elle à son arrivée, désirent travailler, mais pour qui les opportunités sont limitées. Très jeune, Natalia s’impliquait déjà énormément dans sa communauté. En Colombie, elle travaillait avec différents organismes communautaires pour aider les jeunes et les familles dans le besoin. L’entraide est bien ancrée dans son ADN. Quand elle a compris qu’elle pouvait à la fois pallier son manque de main-d’œuvre et offrir un emploi à des gens dans le besoin, elle n’a pas eu à réfléchir longtemps. D’autant plus qu’elle se reconnaît en eux, elle sait à quel point il est difficile de se retrouver dans un pays qui n’est pas le sien et de sentir un profond isolement.

 

« Personne ne veut t’aider, tu passes Noël toute seule, la fin de l’année toute seule, les anniversaires toute seule. » – Natalia Mejia

 

Former sa nouvelle famille

Bien que 80 % de ses employés soient immigrants, ce n’est pas du tout un pré-requis pour Natalia. Elle a simplement vu l’occasion de mailler un besoin avec ses valeurs et cela lui a permis  d’accéder à un groupe de travailleurs motivés à apprendre, car ils sont venus au Canada dans l’espoir d’améliorer leur qualité de vie. Pour faire partie de l’équipe, ils n’ont pas besoin de savoir coudre. Les gens que Natalia embauche doivent réellement avoir la volonté d’apprendre car son équipe investira environ 2 mois pour les former. Pendant cette formation intensive, ils apprennent tous les aspects de la couture. Au fil du temps, ils deviennent de plus en plus autonomes, de plus en plus spécialisés et polyvalents à la fois; ils se forgent un métier.

 

« Derrière chaque être humain, il y a des histoires qui les font agir de telle façon et si on est capable de venir leur montrer qu’ils ont des forces et des vertus on va obtenir le meilleur d’eux ».  – Natalia Mejia

 

Pour Natalia et Estevan, il est primordial que chacun trouve sa place et que chacun sente qu’il a désormais une nouvelle famille au Canada. Les membres de l’équipe deviennent en quelque sorte une famille adoptive alors qu’ils sont si loin des leurs.

 

Des conditions de travail adaptées

Connaissant très bien les défis d’élever des enfants et de gérer l’agenda familial, Natalia tient à être flexible avec ses employés. Elle leur offre d’ailleurs la possibilité de travailler de la maison en sous-traitance. Néanmoins, la plupart d’entre eux préfèrent travailler sur place à l’atelier. Leurs horaires sont flexibles, leur permettant de jongler avec les contraintes familiales. Le taux de rétention du personnel est élevé, car les conditions de travail sont adaptées pour tirer le maximum de chacun tout en leur permettant d’avoir un équilibre travail-famille.

 

Grandir et demeurer fidèle à soi-même

Les affaires vont bon train chez Couture Porte-Bonheur et la demande ne cesse d’augmenter. Natalia et Estevan ont atteint un nouveau plateau dans le développement de leur entreprise et ils doivent maintenant trouver des solutions pour gérer leur croissance rapide. Toutefois, il est important pour eux de faire des choix éclairés qui leur correspondent et qui demeurent alignés avec leur vision et leurs valeurs.

 

« Notre objectif est de grandir sans changer qui nous sommes, sans changer nos priorités. Si grandir va nous faire changer nos principes, nos valeurs, je dirais que ça n’en vaut pas la peine.  C’est mieux d’aller plus lentement si on n’est pas capable de grandir de la bonne façon. » – Natalia Mejia

 

Bien que l’entrepreneure soit consciente que l’entreprise doit faire des revenus pour continuer à grandir, pour elle, l’investissement en temps et en argent qu’elle fait ne vaut pas la peine si ça ne crée pas de bonheur autour d’elle. Pour Natalia, l’entrepreneuriat est un vecteur de changement qui lui permet de créer un monde meilleur, plus humain :

 

« De venir ici et que tout le monde soit heureux, pour moi, ça c’est la priorité. D’arriver le matin, de savoir que quand les gens entrent ici ils se sentent dans un espace où ils peuvent s’épanouir, où ils peuvent travailler (…) c’est le fait d’avoir des gens qui peuvent apprendre, qui peuvent s’intégrer et qui sont valorisés. »

 

Une année d’apprentissages

Il y a un an, Natalia a décidé de venir chercher de l’accompagnement chez Espace-inc. Estevan et elle étaient en affaires depuis longtemps déjà, mais  savaient que leur entreprise manquait de structure. Ils ne s’étaient jamais attardés à valider leur proposition de valeur ou leurs canaux de vente… Leur duo aux compétences complémentaires, leur avait jusqu’ici permis d’être rentable.

 

« Il n’y avait pas de structure. On continuait à grandir et c’était trop risqué de continuer comme ça parce que quand tu dois payer 1000 $ ou 2000 $ de salaires c’est facile, mais quand tu dois payer plusieurs dizaines de milliers de dollars à chaque mois en salaires, il faut avoir une belle structure pour savoir comment tu vas le faire. » – Natalia Mejia

 

Admise dans le parcours IMPULSION, Natalia a accepté de se poser les vraies questions et de se faire challenger. Sa lead coach, Edith Perreault, lui a permis permis de gagner en confiance et de mettre en place une structure qui supportera la croissance de Couture Porte-Bonheur. Les choses ont beaucoup bougées dans son entreprise depuis 1 an, mais Natalia sait où elle s’en va, et ce, en restant fidèle à elle-même:

 

« Je pense que la Natalia d’il y a un an, quand on lui demandait ce qu’elle fait dans la vie, elle disait je suis une couturière, on fait des vêtements. Je n’avais jamais fait un pitch de vente alors je ne savais pas me vendre. Je ne savais pas vendre ce qu’on faisait et je n’avais pas la capacité de le faire. Le premier pitch de vente que j’ai fait, je l’ai fait le jour où on s’est rencontré à Sherbrooke avec Espace-inc. Pendant toute cette année, le fait d’avoir une coach qui nous appuyait, qui était là pour nous… ça a réaffirmé nos connaissances. Alors, je pense que c’est ça qui nous a permis de grandir si rapidement dans une année. ». – Natalia Mejia

 

Natalia, un grand merci d’avoir pris le temps de me rencontrer. J’ai découvert une personne profondément humaine et inspirante! C’est une réelle motivation pour nous de travailler avec des entrepreneurs comme toi, qui non seulement font rouler l’économie du Québec, mais qui rendent le monde meilleur petit à petit. J’aimerais clore l’article avec tes propres mots, qui te correspondent, qui guident ta vie et qui sont un exemple à suivre. Ce sont des valeurs qui résonnent fort chez Espace-inc :

 

« Derrière chaque être humain, il y a des histoires qui les font agir de telle façon et si on est capable de venir leur montrer qu’ils ont des forces et des vertus on va obtenir le meilleur d’eux ».


Entrevue et rédaction :
Amélia Bourbonnais – Coordonnatrice administrative, Espace-inc